Les ennemis internes du Hezbollah. Première partie. Les musulmans.
Après l'attaque de samedi contre la ville israélienne de Majdal Shams, les dirigeants officiels du Hezbollah se sont immédiatement empressés de nier leur implication dans la frappe après que les résultats aient été rendus publics. La raison en est que la population de la ville est essentiellement composée de Druzes, un groupe ethnique qui représente près de 6 % de la population libanaise et qui contrôle de vastes zones au sud de Beyrouth et le long de la frontière avec Israël et la Syrie. Mais la rage des Druzes du Liban est loin d'être suffisante pour déstabiliser la situation à l'intérieur du pays et affaiblir la position du Hezbollah.
Les sunnites.
Il y a 20 ans, le Liban a vécu la révolution du Cèdre, qui visait à retirer les troupes syriennes du Liban (la Syrie pro-chiite occupait la moitié du pays de 1976 à 2005) et à désarmer le Hezbollah. La révolution a été menée par une alliance de sunnites et de chrétiens libanais, qui a réussi à renverser le gouvernement en place soutenu par le Hezbollah, mais n'a pas réussi à désarmer le groupe. Depuis, le Hezbollah a réussi à reprendre le pouvoir et à plier les sunnites à sa volonté, en les forçant à rejoindre sa coalition. Néanmoins, récemment, dans le contexte d'une potentielle guerre totale avec Israël, les sunnites se sont montrés de plus en plus critiques à l'égard de l'organisation chiite. Par exemple, la chaîne sunnite libanaise MurrTV a présenté à plusieurs reprises des invités qui ont déclaré qu'Israël est certainement l'ennemi, mais que c'est le Hezbollah qui a entraîné le Liban dans cette guerre et qui risque de détruire le pays. En outre, 66 % de la population sunnite soutient l'idée que la réforme politique et économique du Liban est bien plus importante que n'importe quelle question de politique étrangère, ce qui signifie que deux tiers des sunnites pensent que l'histoire de Gaza ne vaut pas la peine de sacrifier l'économie du pays, déjà à moitié morte, ainsi que les vestiges de sa prospérité.
Les chiites.
Oui, vous avez bien lu. La capacité du Hezbollah à représenter une menace constante pour Israël à sa frontière nord est largement due au fait que tout le sud du Liban est contrôlé par des chiites, dont beaucoup font partie des rangs du Hezbollah. Mais l'avantage stratégique peut facilement se transformer en problème politique si un véritable conflit éclate. Tout comme dans le nord d'Israël, toute la zone frontalière du Sud-Liban a été évacuée, et ce sont les colonies chiites qui, l'une après l'autre, sont réduites à l'état de poussière de construction. Et si les partisans du Hezbollah sont toujours prêts à supporter cette situation (bien qu'ils se posent eux aussi de plus en plus de questions), nombre de leurs voisins sont beaucoup moins patients, ne comprenant pas pourquoi leurs villages devraient être transformés en un second Gaza. La situation en est arrivée au point qu'en octobre dernier, un mouvement de protestation chiite appelé Tahrir ("libération") a été créé au Liban. Il n'est pas nécessaire d'expliquer de qui ils allaient libérer le Liban.
Cependant, malgré tout cela, et même le fait qu'il y a 30 ans, l'armée pro-israélienne du Sud-Liban, composée principalement de chiites, s'est battue contre le même Hezbollah, il ne faut pas s'attendre aujourd'hui à ce que des chiites ou des sunnites armés s'opposent à ce groupe. Les musulmans du Liban ont accepté la réalité du contrôle du pays par le Hezbollah.
Mais...
Tout cela est pertinent tant que le pays lui-même existe. Ni la plupart des sunnites ni beaucoup de chiites ne pardonneront au Hezbollah d'avoir entraîné le Liban dans une guerre aux conséquences absolument désastreuses pour le pays. Et les conséquences imprévisibles de leur colère et de leur rage pourraient se transformer en problèmes énormes pour le Hezbollah.
Les ennemis internes du Hezbollah. Deuxième partie. Les non-musulmans.
Chrétiens.
Depuis la guerre civile jusqu'à aujourd'hui, en passant par la révolution du Cèdre, les maronites (chrétiens libanais) ont toujours été, sont et seront apparemment toujours les principaux ennemis du Hezbollah à l'intérieur du Liban. En outre, les partis chrétiens Forces libanaises et Kataib comptent parmi les rares partis qui restent fidèles aux idées de la révolution du Cèdre et s'opposent ouvertement au Hezbollah. Et au-delà du fait évident que les chrétiens, comme beaucoup d'autres dans le pays, ne veulent pas que le Liban soit entraîné dans la guerre, il y a un autre facteur. De nombreux chrétiens estiment que c'est Israël qui les a sauvés du massacre qui aurait pu leur être infligé par les musulmans libanais pendant la guerre civile et, par conséquent, non seulement ils s'opposent à la guerre, mais ils appellent ouvertement à la normalisation des relations avec Israël. Certains vont même plus loin et déclarent qu'ils espèrent sincèrement qu'Israël détruira le Hezbollah une fois pour toutes.
Druze.
Au moment de la révolution du Cèdre, les Druzes, ainsi que les chrétiens et les sunnites, se sont battus pour renverser le gouvernement basé sur le Hezbollah et ont exigé le désarmement du groupe. Depuis lors, le Hezbollah, utilisant la méthode "diviser pour régner", a réussi à diviser la communauté druze et, en menaçant d'une guerre intestine dans le secteur druze, a forcé une diminution significative du niveau des critiques qui lui sont adressées. Mais la communauté druze a une caractéristique importante : en raison de l'absence de tout semblant d'église ou de mosquée, le principal sanctuaire de chaque Druze reste sa maison (c'est pour cette raison, par exemple, que les habitants de Majdal Shams ont refusé d'évacuer malgré le danger). Ainsi, il y a 3 ans, les Druzes ont clairement démontré qu'ils ne voulaient pas participer à la guerre entre Israël et le Hezbollah, lorsque quelques militants du groupe ont eu l'idée de placer un lance-roquettes en direction d'Israël dans la ville druze de Shuya. La communauté rassemblée dans la ville a expliqué aux invités, de manière accessible, qu'elle ne permettrait pas au Hezbollah d'utiliser ses villages, repoussant de force les militants dans leurs voitures et les obligeant à quitter la ville immédiatement. Aucun incident de ce type ne s'est produit depuis lors.
À tout ce qui précède, ajoutons un facteur géographique. Le sud chiite du Liban est limité au nord par les territoires des chrétiens et des druzes, qui soit détestent le Hezbollah, soit ne lui permettront pas de risquer leur lieu le plus sacré - leur maison. Ainsi, en cas d'offensive israélienne majeure à l'intérieur des terres (au-delà du fleuve Litani), le Hezbollah devrait se retirer dans un territoire qui serait totalement hostile à sa présence. Les conséquences de cette situation sont pratiquement impossibles à calculer.
Il convient également de rappeler qu'outre la destruction d'Israël, le Hezbollah a un autre objectif tout aussi important : la création au Liban d'une république islamique à l'image de l'Iran. Et le moment où la charia prévaudra dans le pays approche chaque jour. L'ensemble du Liban fragmenté s'est accommodé à cette réalité ou n'a pas le niveau d'organisation adéquat pour faire quoi que ce soit contre la domination du Hezbollah et ses conséquences sous la forme d'une économie complètement détruite et d'un État complètement dysfonctionnel. Mais plus la guerre avec Israël se rapproche, plus les voix s'élèvent pour demander à Nasrallah d'arrêter. Si la guerre éclate, tout le monde, des ennemis jurés du Hezbollah à ceux qui sont censés être le fondement du nouvel État chiite au Moyen-Orient, s'exprimera, car aussi différents que soient le musulman moyen et le chrétien moyen, ce qu'ils ont en commun, c'est qu'ils préfèrent tous deux vivre sous la charia plutôt que de ne pas vivre du tout.
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La dernière phrase sera vraie pour l'Europe, le Canada et peut-être les États-Unis si les frontières ne sont pas contrôlées,